« Le chômage en mal d’histoires » est une démarche qui a été imaginée pour que des élèves puissent découvrir de façon active le métier d’historien et d’économiste et les grands enjeux scientifiques de la recherche actuelle autour des causes du chômage. Dans cette perspective globale, F93 s’est à nouveau adressé aux historiens Pierre Singaravélou et Quentin Deluermoz, auteurs de l’ouvrage Pour une histoire des possibles (Le Seuil, 2016), consacré à l’histoire contrefactuelle, et spécialistes de cette démarche qui invite à explorer les passés non advenus en se demandant « Que se serait-il passé si… ? ». Ensemble, ils ont assuré la direction scientifique du projet et coordonné le travail des historiens encadrant les ateliers.
Intervenant-e-s:
SYLVAIN PATTIEU, NICOLAS HATZFELD / HISTORIENS, PAUL FAURE/ ÉCONOMISTE
Chargé-e-s de projet:
MARIETTE GAILLARD, MATHIEU MARION, FLORISE PAgÈS
Ateliers:
Le chômage de masse est souvent perçu comme une fatalité dont les causes sont rarement interrogées dans leur globalité. Il nous a donc semblé particulièrement intéressant d’appliquer à cette thématique une démarche contrefactuelle dont l'un des grands bienfaits, entre autres, est de défataliser l'histoire et de réfléchir à des scénarios alternatifs qui auraient pu advenir dans un espace et selon
Une temporalité donnée
À travers l’étude d’une période charnière, et en s’appuyant sur une documentation fournie, chaque classe a ainsi pu réfléchir aux leviers qui auraient pu être actionnés par les acteurs de l'époque. Grâce à cette démarche originale, les causes du chômage de masse sont ainsi devenues un champ d'études foisonnant et ont été manipulées avec rigueur et imagination.
Dans chaque groupe, encadrés par un chercheur, les élèves ont ainsi pu aborder les questions d’adaptation de l’appareil productif et du monde du travail à l’évolution du contexte économique et interroger les choix qui ont été faits en proposant des scénarios alternatifs plausibles, qu’ils se sont attelés à construire.
Classe de Première d’Elodie RÉMY, Lycée Charles De Gaulle, Rosny-sous-Bois (93), accompagnée par Paul Faure, chercheur en économie-sociologie à l’Université PSL
Sujet traité et présenté lors du colloque de restitution : Les travailleurs de Marienthal, une contre-dystopie
En partant de l’enquête sociologique Les chômeurs de Marienthal, (1933), ce groupe s'est intéressé à l'explosion d'un chômage de masse dans le contexte de la crise économique, sociale et politique des années 1930 en Autriche. Dans une habile mise en abîme, les élèves ont imaginé qu’ils étaient des chercheurs s’intéressant aux expériences menées à ce moment-là dans la petite ville de Marienthal pour échapper au chômage, expériences qui auraient été évoquées dans un livre intitu,lé Les travailleurs de Marienthal. Les différents scenarios proposés ont été d’une grande richesse, faisant intervenir toute une série d’acteurs, politiques, économiques, syndicaux ou encore associatifs et jouant de leviers imaginés à plusieurs échelles, de la ville elle-même à l’Europe entière.
Classe de Terminale de Servane MARZIN, Lycée Paul Robert, Les Lilas (93), accompagnée par Sylvain Pattieu, Maître de conférences en Histoire contemporaine à l’Université Paris 8-Saint-Denis
Sujet traité et présenté lors du colloque de restitution : La montée du chômage et la fermeture des frontières à l’immigration de travail, une contre-histoire.
Dans une perspective plus contemporaine, le second groupe s’est intéressé à un turning point unique, avec la suspension, le 5 juillet 1974, de l’entrée de travailleurs immigrés en France dans un contexte de crise économique et de montée du chômage. Interrogeant la pertinence de cette relation faite entre chômage et immigration, les élèves ont réfléchi aux conséquences économiques et politiques qu’aurait pu avoir la suppression de cette décision en France à différentes échéances, du milieu des années 70 à aujourd’hui.
Classe de Terminale de Sébastien YVES-PILLON, Laurence GISSINGER et Marie ZENNOUCHE, Lycée Évariste Galois, Noisy-le-Grand (93), accompagnée par Nicolas HATZFELD, Professeur émérite en Histoire contemporaine à l’Université Évry-Paris-Saclay
Sujet traité et présenté lors du colloque de restitution : Le déclin de l’usine Peugeot de Sochaux, une contre-histoire
À une autre échelle, le troisième et dernier groupe s’est intéressé à la trajectoire de l’usine Peugeot de Sochaux en partant d’une question qui s’était véritablement posée aux cadres dans les années 1970 : « Et si l’usine arrêtait de grossir ? ». Mobilisant différents leviers, ils ont fait en ce sens une série de propositions alternatives à la trajectoire réellement advenue et ont ainsi exploré le champ des possibles en termes de reconversion économique, transition écologique, prise de décisions politiques ou encore participation directe des travailleurs à la gestion de l’usine.
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Tous ces projets ont fait l’objet d’une restitution collective sous forme d’un colloque à la Sorbonne, dans l’amphithéâtre Descartes, le 19 mai 2025.
À cette occasion, les trois classes qui ont participé au projet ont présenté à tour de rôle les productions et les hypothèses contrefactuelles qu’elles avaient développées et éprouvées pendant l’atelier encadrées par les intervenants historiens et économistes. Devant le public invité, les historiens Pierre Singaravélou et Quentin Deluermoz ont assuré la modération scientifique du colloque et ont débattu avec les classes des scénarios qu’elles avaient envisagés.
La diversité des sujets et des angles choisis a permis d’éprouver de nombreuses variations de la démarche contrefactuelle, à des échelles complémentaires et variées ; la place du hasard, les conséquences structurelles à plus ou moins long terme ou encore les liens de causalité à différentes échelles.
Remerciements : F93 tient à remercier l’Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne pour avoir accepté d’accueillir le colloque de restitution du parcours au sein de l’amphithéâtre Descartes.
Sorties :
- Visite/Parcours sonore « Voyage en industries » (Pavillon des projets de Boulogne-Billancourt) autour du passé industriel de l’île Seguin et de Boulogne avec de nombreux témoignages enregistrés d’ouvriers ayant travaillé chez Renault
- Rencontre et discussion avec Amazouz Arezki, ancien OS des usines Renault et fondateur de l’Association des Travailleurs Renault de l’Île Seguin (ATRIS)
- Visite et atelier aux Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine, autour des luttes menées dans les années 1970 par des travailleurs de Seine-Saint-Denis
Lycées:
- CLASSE DE TERMINALE DU LYCÉE ÉVARISTE GALOIS, NOISY-LE-SEC
- CLASSE DE TERMINALE DU LYCÉE PAUL ROBERT, LES LILAS
- CLASSE DE 1ÈRE DU LYCÉE CHARLES DE GAULLE, ROSNY-SOUS-BOIS
Photos:@Antoine Dumont
Avec la période de confinement, les démarches initiées en collège ont connu quelques changements, également quelques aménagements et surprises. Le moment est venu de présenter ce qui a été finalisé par les élèves, les enseignants et les intervenants. Cet espace de diffusion rapporte nombre de témoignages visuels, sous des formats à la fois fixes et animés, et invite les visiteurs à une découverte différenciée : en cela par projet identifié ou d’une manière plus aléatoire.