Aux risques de l'information

Depuis 2009, le Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis soutient « la Culture et l’Art au Collège (CAC) ». Cette démarche repose en grande partie sur la présence, en classe et pendant plusieurs semaines (40h), d’un artiste ou d’un scientifique ayant pour mission d’engager les élèves dans un processus de recherche et de création.
Ce projet s'inscrit dans le cadre de la démarche AGORA.

Intervenant-e-s:
CONSTANCE DECORDE, CÉDRIC GERBEHAYE / PHOTOjournalisteS, YAËLLE BENAÏM, AUDREY LéBEL, SARAH-LOU LEPERS / JOURNALISTES

Chargées de projet:
Mariette Gaillard, FLORISE PAGÈS

Atelier

Objectifs :
L’objectif de la démarche consistait à aborder en journaliste un problème de journalisme : jusqu’où peut-on aller pour informer et quels risques peut-on prendre pour le faire ? Accompagnés tout au long du projet par des journalistes, les groupes se sont lancés dans une enquête sur la variété de ces situations « risquées », et parfois inattendues. Ensemble, il s’est agi d’identifier et d’interviewer des témoins directs : journalistes d’investigation, reporters de guerre, organisations comme « Reporters sans frontières ». Riches de ces échanges, les classes ont ensuite créé un podcast qui a repris les grandes étapes de leur enquête sur le devoir d’informer et ses éventuelles limites.

Profession journaliste
Dès le début du parcours, les intervenants ont présenté aux classes la commande qui leur était faite : réaliser une enquête traitant des risques inhérents au métier de journaliste et de la façon dont les premiers intéressés les gèrent, pour en faire un podcast. À partir d’enquêtes et de reportages au long cours qu’ils ont eux-mêmes réalisés, les intervenants ont ensuite fait découvrir aux classes quelques exemples de productions journalistiques, en mettant en avant l’exigence déontologique qui guide leur travail, et les règles élémentaires auxquelles ils doivent se plier. Ce premier échange était également l’occasion de faire un point sur les situations que les élèves perçoivent d’office comme dangereuses pour des journalistes et celles qui étaient moins évidentes à identifier. Les journalistes ont pu, par le biais de ces échanges, aborder les pratiques informationnelles des élèves et revenir sur les différents supports et média qu’ils consomment quotidiennement, les renseigner sur la vérification des sources, la distinction entre fait et rumeur, mais également leur expliquer comment l’information est produite.

Informer, jusqu’où ?
Passée cette étape de découverte du métier de journaliste, les classes sont entrées dans le vif de leur enquête journalistique. Avec l’aide de leur intervenant, chacune a identifié un ou deux témoins clés à interviewer, puis les groupes d’élèves ont démarré des recherches pour découvrir les profils de ces témoins, leurs terrains ou sujets. Ils ont alors préparé leur entretien en se saisissant de thématiques variées (quel parcours professionnel, quels types de difficultés rencontrées, quelles différences entre les pays, quel accompagnement, quelle préparation, quelles séquelles, quelles règles personnelles… ?). Les aspects techniques nécessaires à l’exercice ont fait l’objet de plusieurs essais pour que les élèves sachent enregistrer eux-mêmes, reformuler des questions ou relancer une réponse trop courte etc). Enfin, chaque invité est arrivé en classe et a partagé ses expériences en répondant aux élèves, attentifs. L’une abordait son passage en prison chez les Talibans, ses confrontations avec les groupes armés en RDC ou le rôle de ses fixeurs, l’autre les longues années passées dans des prisons belges pour documenter les conditions de détention, tandis qu’une troisième classe découvrait les risques encourus par un média indépendant pour avoir enquêté sur les ravages écologiques causés par un géant industriel. La collaboration entre un journaliste d’investigation et sa source, une citoyenne lanceuse d’alerte, a été au cœur du travail mené par la quatrième classe. Enfin, le dernier groupe a pu entrevoir un panorama mondial dressé par une ancienne journaliste de Reporters Sans Frontières. Chacun à sa façon, avec son vécu et ses convictions, est revenu sur ce qui l’anime, ce qui le freine aussi parfois, la manière dont il souhaite délivrer cette information et le medium choisi. Toutes ces interviews, enregistrées, ont ainsi servi de matière au documentaire sonore que les classe ont réaliser.

Fabrique d’un documentaire sonore
L’ensemble des enregistrements collectés par les classes ont ainsi fait l’objet d’un temps d’écoute et de tri collectif pour savoir ce qu’il fallait garder à tout prix : répartit en groupes, les élèves ont travaillé sur un passage qu’ils souhaitent intégrer au montage final pour en extraire l’essentiel. Une fois ce choix effectué et argumenté devant de la classe, il a fallu penser une articulation logique de ces extraits, et s’intéresser au son : les élèves ont enregistré quelques phrases d’introductions, de présentation, des remerciements, ils ont prélevé des ambiances sonores provenant des reportages ou films discutés, voulu rajouter de la musique. Ces échanges furent aussi l’occasion pour les élèves de revenir sur les témoignages qu’ils avaient entendus et de réfléchir à ce qu’ils souhaitent nous dire sur le devoir d’informer, ses obstacles et ses éventuelles limites. Leurs réflexions ont également été enregistrées et sont venues ponctuer l’ensemble, pour former le documentaire sonore final.

Partager
Le 12 juin matin, les 5 classes participantes se sont retrouvées dans l’amphithéâtre de la Bourse du Travail à Bobigny pour un temps d’écoute et de partage autour de leurs productions audio. Les élèves ont présenté leurs sujets et approches, avant la diffusion de leur podcast, et ont répondu aux questions des autres élèves. En partenariat avec la Maison des Journalistes, deux journalistes exilés de Haïti et Tunisie, étaient conviés à rebondir sur les questions soulevées par les élèves et témoigner de leur propre expérience.

Remerciements : à Walid Bourouis et Jean Samuel Mentor, de la Maison des Journalistes, pour leur participation à la restitution, merci à Pauline Adès-Mevel, Paul Salvanès, Marine Courtade, Samy Archimède, Marie-Aline Le Cler d’être venus à la rencontre des classes, à Camille Scanvyou, du groupe France Médias Monde, à Malcolm Duquesney de BFMTV, pour leurs accueils chaleureux.

Sorties :
- Film documentaire « La Peine », cinéma L’Espace Saint-Michel, Paris
- Atelier France Info junior, Maison de la Radio, Paris
- Le Monde, Paris
- Visite des studios de BFMTV, Paris
- Visite des rédactions et des studios de France Médias Monde, Paris

Collèges :
- Classe de 5èA du collège Françoise Héritier, Noisy-le-Sec
- Classe de 3è1 du collège Jean Lolive, Pantin
- Classe de 4è2 du collège Théodore Monod, Gagny
- Classe de 3è2 du collège Raymond Poincaré, La Courneuve
- Classe de 4è1 du collège Antoine Laurent de Lavoisier, Pantin

Photos : @Antoine Dumont, F93